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Devenir omnicanal grâce à la RFID ?

Retail et RFID entretiennent sans aucun doute une relation bien ambiguë. D’un côté la technologie apparaît comme d’un autre temps par rapport à l’internet des objets et les premières IA qui envahissent la presse spécialisée. De l’autre, elle semble n’être jamais arrivée à maturité pour réaliser les fantasmes de tout retailer comme la géolocalisation, l’inventaire temps réel ou le tracking end to end.

Et pourtant, aujourd’hui, selon un rapport de l’Université d’Auburn (Alabama, USA), 96% des retailers déclarent s’intéresser à la RFID et envisagent d’adopter la technologie.

RFID, UNE TECHNOLOGIE A MATURITE 

Un regard vers le cycle Gartner semble nous confirmer que le plateau de productivité de la RFID a été atteint depuis déjà 3 ans. Plusieurs facteurs permettent d’expliquer cela, à commencer par la baisse drastique du coût de la technologie sur l’ensemble de la chaîne. Le prix des tags simples avoisine aujourd’hui les 3 centimes, quand il faut compter autour de 2 000 € pour un lecteur RFID soit pas beaucoup plus que la plupart des terminaux radio aujourd’hui utilisés en magasin. Le nombre de fournisseurs RFID présents sur le marché aujourd’hui contribue aussi à une baisse importante des coûts. Peu intègrent cependant l’intégralité de la chaîne RFID : puces, tags, lecteurs, applicatif et intégration. A cela vient s’ajouter une normalisation par exemple par GS-1 des codes EPC (Electronic Product Code), ce qui garantit l’unicité des codes.

D’ailleurs, la plupart des retailers ne s’y sont pas trompés et ont déjà, avec plus ou moins de réussite, adopté la technologie en entrepôt et en boutique. Outre-Atlantique, Macy’s vise aujourd’hui le 100% RFID et permet le « Pick to the Last Unit » grâce à une justesse de stock en quasi temps réel. Décathlon depuis près de 4 ans tague à la source près de 90% de ses articles. Hervé d’Halluin, en charge du programme RFID chez le leader français du sport a récemment annoncé le lancement de la phase 2 de leur programme : objectif 100% RFID en juin 2018. A la clé, encaissement rapide, information client facilitée via des bornes interactives et justesse de stock. La RFID est également utilisée pour se prémunir de la contrefaçon chez Moncler. Elle équipe des cabines interactives chez Rebecca Minkoff, chez John Lewis et bien d’autres encore.

Cependant, gare à la promesse du « 100% géolocalisation – stock juste – temps réel ». Avoir en temps réel la vision de l’intégralité du stock reviendrait à tapisser le plafond, les tiroirs, les armoires ou encore les réserves de capteurs RFID. Le tout idéalement dans un magasin sans métal. La géolocalisation au tiroir près demanderait non seulement d’avoir la notion de tiroir dans le back-office magasin, fonctionnalité plus que rare, mais en plus d’avoir un capteur dans chaque tiroir et d’isoler chaque tiroir de son voisin. Avec des conséquences immédiates sur votre CAPEX, pour une efficacité opérationnelle à démontrer. Même si la technologie continue de progresser avec l’apparition de solutions pour les flacons de parfum par exemple, ce qui permet à Sephora de se lancer dans l’aventure, pour le DIY (Do It Yourself) il y a encore un peu de chemin à faire.

RFID, CATALYSEUR DE l’OMNICANAL ?

Il est intéressant de dresser un parallèle entre l’arrivée à maturité de la RFID, qui jusque-là avait du mal à trouver sa place dans la chaîne de valeur du distributeur et l’ambition d’omnicanal. Le second aurait-il appuyé le développement du premier ? Un stock juste est un prérequis à l’alignement de l’offre off-line et on-line. La RFID permet de répondre à la promesse client de disponibilité des articles sans avoir à concentrer l’effort en boutique sur le comptage du stock. Les études les plus récentes auprès de retailers, notamment américains, font part d’une justesse de stock de près de 95%. Les 5% restants étant attribués à des erreurs de processus ou à des limites de la technologie. La justesse de stock est la première brique de toute ambition d’omnicanal.

Cependant, atteindre un ROI sur la seule justesse de stock semble difficile. Contrairement à d’autres technologies qui, a priori, apportent les mêmes garanties (GPS, Bluetooth, NFC, Wifi…), la RFID permet d’atteindre un ROI plus rapide du fait de l’addition des gains opérationnels sur l’ensemble de la chaîne de valeur du Distributeur. Le Beacon est cher, le NFC demande trop de proximité, le Wifi n’est pas assez sécurisé et pas assez précis…

La plupart des retailers ayant mis en place la RFID ont constaté des effets directs sur la baisse de la démarque (moyenne de 5 points), une baisse des ruptures magasin (baisse de 8 points) ou sur l’augmentation de la marge opérationnelle (moyenne de 5 points). De plus, la RFID permet de diminuer les non-ventes et d’améliorer le chiffre d’affaires supplémentaire. L’identification unique de l’article vous permet de compléter le panier de vos clients en réalisant du cross-selling. Un encaissement rapide va permettre, en plus d’éviter des abandons de panier, de remettre les collaborateurs au milieu de la surface de vente, au contact du client. Le tracking des articles entrant en cabine, en sortant, passant ou ne passant pas en caisse, va offrir une nouvelle source de data monnayable sur d’éventuels problèmes de fitting de vos articles ou de ceux de vos fournisseurs. Et d’autres gains encore propres à chaque business model que chaque retailer devra inventer et aller chercher.

UNE TECHNOLOGIE CAPRICIEUSE ET CONTRAIGNANTE ?

La question semble légitime. Nous l’avons vu précédemment, elle ne permettra pas de réaliser le miracle du « 100% – Temps réel – Localisation ». Et si les limites de la technologie étaient justement la clé de réussite des projets RFID ? Avant le choix de la technologie, c’est le choix du modèle qu’il faut poser puisque le grand risque serait de « faire de la RFID pour être dans l’air du temps ». Ensuite seulement vient la question de la technologie et de la RFID. Est-ce que du Beacon n’est pas plus adapté à ce que vous voulez faire ? Est-ce que de la robotique dotée de reconnaissance d’image n’est pas plus adaptée à votre modèle ? Est-ce que votre gestion de nomenclature article est adaptée au code unique propre à la RFID ? Cherche-t-on de l’efficacité opérationnelle, de la nouvelle expérience client ou simplement de l’innovation pour l’innovation ? Les trois ne sont absolument pas incompatibles. Mais ils doivent être RFID compatibles pour être réalisables.

La RFID est peut-être une technologie capricieuse, elle n’en reste pas moins la plus simple de la catégorie « sans contact ». Un code unique, un capteur, une base de données. Un des plus gros risques est donc celui de tordre la technologie pour qu’elle rentre dans vos process et corresponde à ce que vous voulez lui faire faire. En somme, complexifier une technologie qui n’a pas vocation à l’être, c’est le meilleur moyen non seulement pour vous rajouter des coûts supplémentaires mais aussi pour retirer à la RFID ce qu’elle sait faire de mieux et le plus simplement possible. Un EPC, parce qu’il est capté à la volée, ne peut pas, par exemple, renvoyer vers plusieurs rayons. La notion de sans contact et de distance propre à la RFID vous empêche de faire du picking de détail. Inutile d’essayer, vous n’y arriverez pas. Les retailers ayant implémenté la RFID ont dû repenser la plupart de leurs processus magasin pour arriver à tirer le meilleur. Et un programme RFID est souvent l’occasion idoine pour le faire.

Vous l’aurez compris, un projet RFID est un projet particulier. D’abord parce que bien qu’il transforme en partie votre modèle, il ne s’agit pas d’un projet Big-Bang qui est amené du jour au lendemain à bouleverser vos magasins. Décathlon a ainsi décomposé son programme RFID en 2 parties pour l’instant. Derrière ce terme de « programme RFID » se cache pour votre modèle un panel de fonctionnalités qui vont venir s’ajouter les unes aux autres, par-dessus un socle technologique, celui du tagging : inventaire, encaissement rapide, antivolage, miroirs connectés, localisation de passage de seuil, …

Ensuite, quelques-unes de vos spécificités auront un impact sur la mise en place de votre projet, spécificités qu’il convient d’étudier pour en mesurer les impacts. Quelle stratégie de marquage de vos produits ? Maîtrisez-vous votre chaîne de production ? Quels types de produits et quelle architecture magasin ? Quels process intégrés en magasin et quels process intégrés en entrepôt ? Quelle architecture applicative ? Internalisation ou Externalisation d’inventaire ? Inventaires réguliers ou annuels ?

Cet ensemble de questions vous permettra de tracer les contours de votre stratégie RFID et de mesurer l’impact de la mise en place de votre technologie.

>> La RFID semble enfin arrivée à maturité
sur le secteur du Retail et est présente chez de nombreux acteurs.

>> En quoi la RFID est la technologie adéquate pour accompagner la transformation de votre chaîne de valeur ?

>> Comment tirer avantage des contraintes liées à la technologie RFID ? Comment bien préparer sa transition ?